Villeurbanne-Ce que le PLU-H m’a enlevé
Parmi toutes les surprises que m’avaient réservées les promenades nécessaires à l’établissement du travail contributif sur le PLU-H, certaines n’étaient pas de nature à réjouir. La connaissance sacrifie sans vergogne l’innocence à la désillusion patrimoniale. Ce précepte sans doute se vérifie plus qu’ailleurs à Villeurbanne où les choses paraissent suspendues à un fil si fragile que le moindre coup de vent peut le rompre. Au cours des mois de mai à juin derniers mes balades ayant impulsé à mon regard une trajectoire panoramique, il s’est porté sur l’intégralité de ce que les lois d’un implacable renouvellement urbain devaient prochainement réduire à néant. J’en livre ici la vue photographique, l’instantané fidèle reproduit à la date récente où j’ai prospecté, c’est-à-dire le mois de juin 2018.
Depuis, certains des édifices cités ont déjà été abattus.
En voici la carte. Elle figure, en bleu, les édifices ciblés, et en rouge les périmètres d’ensembles plus vastes pour lesquels la restitution des tracés parcellaire a essayé, autant que possible, d’approcher l’exactitude :
Je n’y inclus que les permis de démolition totale dont les travaux n’étaient pas commencés et dont les affichages étaient visibles de tout promeneur. Ils déroulent une liste suffisamment accablante pour se dispenser d’y ajouter les démolitions en cours, les démolitions dont les demandes ont été déposées en mairie mais pas encore délibérées, toutes celles enfin qui s’appliquent à des bâtiments claquemurés, foutus, perdus, dont l’avenir ne fait aucune illusion. Si j’avais dû les ajouter j’aurais considérablement multiplié ma liste. Les enquêtes de terrain attirent aussi leur lot de confidences et le nombre de cas cités par des habitants m’ayant assuré que telle ou telle maison était vendue formerait un sujet à part entière.
Pour joindre mon propos j’y place une ligne conductrice : celle des m2 de démolition correspondant à chaque projet, pour les additionner. Les amateurs de décombres en particulier mais aussi peut-être de gros engins mécanisés auront de quoi s’enthousiasmer, trop souvent on les oublie, et moi je conclurai avec un gros paquet qui sent bon la terre remuée.
Dernière note, ce point, qui devait être la traduction des chiffres portés par les affichages publics, la démonstration que je n’avais usé que de permis de démolir dûment affiché pour construire mon calcul, étant faussé par les affichages eux-mêmes. Les affichages étant ce qu’ils sont, il s’y trouve écrit parfois n’importe quoi. On le comprend, non content de me laisser accomplir à sa place le travail critique et mémoriel, la Ville m’a en plus obligé à corriger son travail de voirie. Ainsi donc quand les mesures étaient absentes ou paraissaient défaillantes j’ai dû estimer les superficies pour en faire le calcul, (alors que j’ai arrêté les maths en CE1). Merci Villeurbanne.
Voici, donc cette liste classée par thématique et par ordre d’importance dans les thématiques :
La petite maison qui n’est plus grand chose
- N° 40 Cours de la République.
Tout est dans la photo, un bâtiment chiche en apparence, cerné par un environnent totalement densifié et renouvelé, sans correspondance avec lui, et qui pour toutes ces raisons n’arrive plus à voir le jour plus d’une heure pas jour (et pour lequel je n’ai pas souhaité sacrifier les miennes). Autant le dire tout de suite la démolition, puisqu’il en faut bien, parait trouver sa meilleure justification dans ce genre de spécimen. Les seules conditions préalables que l’historien et le citoyen y mettraient toutefois serait que l’on sache ce qu’on démolit et que l’on y substitue de la qualité, des pré requis souvent nuls hélas.
SA HLM Villogia : 180m2
- N° 138 Cours Tolstoï.
Cette petite maison non plus ne vaut pas tripette. Elle introduit un ensemble sur cour comprenant de nombreuses petites dépendances :
Territoire et développement, pour SCCV Karenine : 375m2
- N° 22 et 24 rue de la Poudrette.
Deux minuscules survivances sans grand intérêt dans un secteur bouleversé . A noter que dans cette rue le coté Vaulx-en-Velin qui fait face est bien plus remarquable. Sur cette surface très réduite qui rend mal compte de l’étalement des nouvelles zones urbaines les géants du béton se sont donnés r-d-v :
Cogedim : 245m2 environ
- N° 102 rue Alexis Perroncel.
Quartier des Poulettes, un petit portail rétro et pas grand-chose de plus là non plus à défendre. Seul mystère, ce que dissimulent les bâtiments très en retrait sur cour et peu visibles depuis la rue :
SCIFCG : 315m2
Le petit édifice qui n’a l’air de rien
Comprendre dans le titre qu’il ne suffit pas de se fier aux apparences.
- N° 19 Rue René.
Une petite maison à la très grande simplicité, parfaitement implantée dans son tissu originaire, d’ailleurs futur périmètre d’intérêt patrimonial dans le PLU-H révisé. C’est à une petite initiative privée malheureuse que l’on doit cette démolition. A l’heure où l’on parle le bâtiment n’existe plus :
300m 2
- N° 64 rue de Fontanières.
Ce qui navre dans la disparition de cette petite maison du quartier des Poulettes, particulièrement ciblé des démolisseurs, c’est, sous des dehors modestes, la qualité de conservation que sa cohésion ajoute à l’ensemble : grille, marquise, etc. L’œuvre des promoteurs Katrimmo est connue et réputée, en particulier pour sa contribution efficace à la rectification du portrait du quartier Montchat à Lyon :
Katrimmo : 100 m2
- N° 9 rue Frédéric Mistral.
S’il est difficile de se prononcer sur la qualité de la demeure, peu visible depuis la voie publique, le portail témoigne à sa manière. Pierre de taille (et pots à feu), marque rare qui dénote un profond caractère d’ancienneté. Pas étonnant, nous sommes dans l’ancienne allée du Sacré-Cœur qui conduisait jadis au Château de la Ferrandière. Voici le genre de disposition qui devrait jouir d’un regard éclairé au lieu d’être dispersé à la légère. Le voisinage enfin est charmant et introduit le quartier des Maisons neuves. Bref, ce projet c’est la suite de la gangrène du cancer du Sida mais qui a son passeport dans le quartier, parce que, ça va, il a passé les examens d’entrée.
SNC Cogedim : 162 m2
- Bâtiment industriel angle des rues Gervais Bussière/ Salengro.
L’Avenue Salengro a subi un tel naufrage qu’on peut se croire autorisé à s’étonner vivement à la découverte de cette espèce de figure de proue qui dresse l’angle saillant de son industrieuse figure à l’avant des deux rues, à deux pas d’un secteur qui a été raboté jusqu’à l’os. Usé jusqu’au coude, et dégoutant d’oubli, son pittoresque pourtant le relève. A noter en particulier l’usage d’atypiques contreforts qui scandent l’ocre façade et dérobent l’édifice au déterminisme de la fonction. Leur présence ne peut manquer de rappeler les collatéraux d’une église ou en tous les cas un grand programme de construction. En l’absence de PC affiché, le panneau promotionnel déjà au créneau, claironne et se substitue à la sobriété de la loi et du règlement. C’est une chose que nous comprenons sans peine. Comment en effet résister à l’urgence de répandre une si bonne nouvelle et devancer les usages de voirie réglementaires ? Cette petite contravention m’autorise bien à contrevenir à mes propres prescriptions de m’en tenir aux affichages dûment constatés.
Surface estimée : 1360 m2
- N° 1 Rue Paul Péchoux.
Entrainé à la suite du reste, ce petit appentis n’avait aucune raison de tenir tête au sort qui lui était destiné. Il participait d’un ensemble que j’ai déjà mentionné et qui n’est plus, hélas, qu’un souvenir :
Est Métropole habitat : 465m2
- N° 29 et 31 rue Alexandre Boutin.
Certainement que les bâtiments ne paient pas de mine vus de l’extérieur mais dès le premier coup d’œil au-dedans n’importe qui comprend le potentiel de cette remarquable structure métallique, excepté la plupart des promoteurs :
Dommage que la gouverne sur nos villes leur incombe
SCI FCA : 1017m2
L’édifice qui a l’air de quelque chose
- N° 7 rue Faillebin.
Il semble bien que cette petite villa ressemble à quelque chose : balustres dans le style Louis XIII, serrureries, etc. Autant d’objets dont notre architecture actuelle n’a plus le soin d’orner son quotidien. Cet édifice se situe également dans une future zone d’intérêt patrimonial. Cette fois encore pas d’interaction entre les plans de l’administration métropolitaine et les permis délivrés par la Ville. Et attention, surprise, avec sa généreuse surface excédant les 1000 m2 ce permis de démolir dissimule un véritable ensemble dont la surface est reportée plus loin dans l’ensemble idoine.
- N° 19 rue Louis Fort.
Les mastodontes sont étalés sur le quartier : Est Métropole avale le coin gauche, et Bpd Marignan, poussé par une même voracité, se propose de l’accompagner en face. Abandonnons le premier sujet, déjà bien entamé, pour nous focaliser sur le second. Difficile de donner un avis valable sur une architecture qu’on entrevoit qu’à grande peine, aussi vais-je me contenter d’un avis qui n’a pas de valeur patrimoniale mais qui porte une voix plus universelle encore : la villa richement aménagée, qui n’a pas dix ans, et qui va disparaitre, interpelle sur le rythme et la frénésie à laquelle s’enchaînent les démolitions, le gaspillage déraisonnable dicté par des questions de rentabilité des sols qui en résulte. Qu’une habitation singulière puisse profiter et céder sa place à une habitation destinée au plus grand nombre n’offre un sujet de réjouissance qu’à condition aussi de ne pas multiplier des actions qui puisent dans nos ressources commune : la Terre.
BPD Marignan 340 m2
- N° 127 Avenue Roger Salengro.
Une belle petite villa qui conférerait aisément des envies de vivre entre ses murs paisibles et sous l’espace ombragé de ses grands arbres. Le principe de densification aura bientôt tiré la hauteur vers le haut et la qualité de vie vers le bas.
Cogedim : 167m2
- N° 75 Rue Anatole France/ Impasse Dubois.
Maison après guerre. Pas besoin de sortir de l’École de Chaillot ni d’être titulaire d’un CAP histoire pour saisir le potentiel de cette « bâtisse désaffectée » pour reprendre les termes du panneau d’affichage. Retapée, avec ses balustres, sa marquise, ses charmants volumes rétros, ses derrières intimistes sur l’impasse, voilà un authentique bout de vie qui s’en va de chez nous.
Est Métropole habitat : 418 m2
- N° 68 rue Antonin Perrin.
Même ainsi, avachie, meurtrie et dénaturée, elle évoque quelque chose : sa volumétrie, sa clôture en béton de ciment ouvragée, sa marquise, son bow-window. Sa démolition prochaine inspire les réflexions sur les questions les plus élémentaires de gâchis dans nos politiques urbaines.
SLC SA Cours Vitton : 322m2
- N° 45 rue Anatole France .
Situé en face de l’ENM et réputé pour sa pieuvre taguée, ce remarquable bâtiment industriel composé de deux bâtiments à pignons est l’un des derniers de cette envergure à Villeurbanne. Parfaitement en accord avec les bâtiments voisins, il forme auprès d’eux un tout historique datant de 1920. Les intempéries ayant eu raison de l’affichage, la dernière chose lisible sur ce PC est le mot « Merde ». Sans doute un aficionado qui, en tous les cas, a su investir dans un bon marqueur, à recommander à la direction de l’urbanisme.
SAS Antipolis : Environ 520 m2
- N° 17 Route de Genas.
La poursuite de la démolition d’un grand immeuble bourgeois est symptomatique de l’acharnement et de l’incurie, celui de mener à terme l’élargissement de la Route de Genas mais surtout à prendre sans légitimité sur un immeuble qui ne présente même pas le tort de dépasser la fatidique ligne d’alignement prescrite à la voie. L’atteinte est porté à un genre de construction qui par son ampleur et sa nature grandit une ville pourtant. Que dire d’une ville quand elle se diminue elle-même ?
Est Métropole Habitat : 323 m2
- N° 25 rue de la Poste.
Un projet parfaitement irresponsable qui porte sur une des plus remarquables villas de la commune, une villa Art Déco déjà évoquée sur le blog de mon association La Ville Édifiante. Au lieu d’être entretenue et préservée comme elle le devrait, elle va finir à la benne.
Superficie reportée dans l’ensemble qui l’englobe.
- Hôpital des Charmettes, angle de la rue des Charmettes et de la Viabert.
Tâchant de rester impartial je me borne à un cliché dévoilant la seule partie villeurbannaise d’un projet qui a uni et réconcilié dans le pire, Lyon et Villeurbanne, sa fidèle banlieue. A noter tout de même que Villeurbanne, dans les généreuses habitudes de rebut servile qui sont les siennes, rafle évidemment la palme en jetant à la défausse portion congrue et surface significative de constructions qui pourraient l’embellir. Question enfin de principe. Du reste, ce programme les jardins du 6e, mérite d’être dénoncé pour ce qu’il est : un aménagement nuisible, parfaitement contraire à l’intérêt général :
SCCV les jardins du 6e /SLC pitance : 805 m2 environ pour Villeurbanne
Les ensembles démolis
Ensemble on est plus fort, c’est sûr.
Soustrait du champ ponctuel et marginal du drame de salon, la démolition par paquets rassemble et dispose sous le regard une somme d’édifices. Ils partagent le sort commun du terrassement au motif qu’ils sont voisins et que le terrain qu’ils occupent en dépit des qualités, des altérités historiques et constructive existantes, peut être mutualisé, utilisé et rentabilisé. Les rumeurs du drame s’amplifient alors et deviennent affaire de rues, échos de quartier. Et si la vision de maisons claquemurées, ostracisés, aux entrées bouchées, aux bouches biffées de rouge et de blanc, sollicite la stupeur, force le regret, c’est qu’elle donne la mesure d’un gâchis que tout le monde comprend. Ce gaspillage institué d’ailleurs les programmes immobiliers modernes ne le regardent nullement comme tel puisqu’ils ne portent simplement aucun regard au tissu ancien dont ils signent la ruine. C’est un calcul où les chiffres du gain ne s’embarrassent d’aucune propriété contraire au bénéfice, et un terrain n’en vaut en autre que s’il est aussi bien situé.
Évoquant pourtant la fraicheur désordonnée du champ de fleurs sauvages, les ensembles passés, lotissement et faubourgs, portent sur eux une spontanéité, une diversité d’éclosion dont la fertilité des terreaux humains a permis l’enrichissement des usages et des formes. Cédant à la fabrique d’une banalité stéréotypée, l’attroupement en vue de l’abattage accroit ce nécessaire sentiment de gâchis. Combien d’ailleurs de gouffres en devenir ces panneaux de voirie placardés sur une maisonnette dissimulent-ils en réalité ? La méfiance est de rigueur, il suffira souvent de questionner les surfaces de terrain inscrites à l’affichage pour comprendre que bien souvent ces démolitions ne sont pas les démolitions singulières qu’elles ont l’air d’être.
Quoiqu’il en soit ces ensembles permettent de multiplier les scores. Les chiffres c’est important. En voici la liste.
- N° 159 Rue Jean Voillot.
Les trois maisons qui disparaissent, invisibles à l’arrière du fonds, sont sans caractère et de facture bien moderne. C’est paradoxalement et cette fois encore cette modernité qui questionne sur la rapidité des renouvellements urbains. Il s’accompagne ici d’une modification typologique radicale : les dernières maisons privatives construites cèdent à des logements collectifs au forme et au cadre végétal convenu et sans mystère.
SNC Cogedim Grand Lyon : 650m2
- N° 215 à 219 rue Jean Voillot.
Tout à coté des N°221 à 223, démolis à date récente :
Ce lambeau de lotissement conserve encore sa figure intimiste. Elles sont trois maisons à terminer la rue près de la Route de Genas, poursuivant un drame qui a encore de nombreux actes à jouer.
SCI JV : 415m2
- N° 95 Avenue Roger Salengro / N° 18 rue Georges Courteline.
A classer parmi les affichages vicieux. L’importante surface de terrain désignée laissait entendre que son champ s’étendait bien au-delà la maison qui l’affichait. Et en effet, il traverse discrètement l’Avenue Salengro pour s’achever à l’arrière rue Courteline, du coté de bâtiments industriels sans grand caractère, ou pour mieux dire, pour achever la rue Courteline. Pour cette pauvre rue la courbure seule désormais incombe la tâche difficile d’évoquer le pittoresque d’une voie d’occupation ancienne. La prise de connaissance du programme avancé par le Clos Wilson permet de s’assurer du projet exact. Le N° 95 à proprement parler est une maison de 2 étages qui dénote les années 30. Son goût est à rechercher dans la simplicité, l’unicité du détail et du dépouillement géométrique. Il reste regrettable de voir disparaitre une maison comme celle-ci. D’un autre coté on comprend sans peine que les besoins de densification et de hauteur se fassent entendre plus fort ici qu’ailleurs, sur des grandes artères .
Les nouveaux constructeurs, SNC LNC Aleph Promotion : 998m2
- N° 192 à 196 Av Roger Salengro/1 rue Octavie.
Un petit groupe de maisons dans un futur périmètre d’intérêt patrimonial, donc supposé jouir du privilège d’un minimum de surveillance. Estropié le premier, oublié le second. Le projet s’appelle Octavie, du nom de la rue que l’on démolit.
Nexity : 972m2
- N° 39 à 43 rue Château-Gaillard.
Encore un ensemble qui passe inaperçu. Le N° 41, une maison, la seule vraiment visible depuis la rue, forme avec les autres bâtiments à l’arrière, un ensemble très hétéroclite. En s’aventurant à travers il est malaisé de distinguer la nature des bâtiments, entre ceux d’apparence neuve mais d’ailleurs inachevés et promis à la démolition, des résolument neufs en cours de construction juste à coté. L’arrière du N° 41 se poursuit sur une parcelle très verte. Cette fois c’est la mise à mort d’un tel bouquet de verdure qui chagrine. Il y a là en effet un jardin comprenant de nombreuses essences fruitières : figue, pomme, cerise et même une vigne, en un mot un cadre de vie. Le tout est enrobé dans un affichage particulièrement pété qui ne s’embarrasse pas des formalités, notamment l’indication de surface à démolir. Juste de quoi vous convaincre finalement que l’avenir de votre ville n’est pas votre affaire, en vous laissant cordialement le choix entre l’asphyxie ou la vie.
SCCV l’Opaline : Environ 300 m2 ?
- N°69 à 75 rue Greuze.
Au moins cet affichage a le mérite -et ça devient suffisamment rare pour être salué -d’annoncer la couleur en citant précisément les adresses et les numéros impactés. Il affecte un lot de petites maisons de lotissements. A citer parmi elles une maison avec ses lucarnes ainsi qu’une curieuse maison entourée de sa clôture en bois d’allure très rurale.
Icade Promotion : 710 m2
- Impasse Comby/ N° 67 et 69 rue des Bienvenus.
Au programme petites maisons et espace intimiste à aller quêter en fond d’impasse. Villeurbanne a fait ces petits paysages tout simples et ces petits paysages tout simples ont fait Villeurbanne. Au rythme où vont les choses il n’y a aucune raison d’en voir subsister d’ici 50 ans. Je ne résiste pas à l’envie de dévoiler le projet immobilier visible sur le site d’Agrega (atelier d’architectes). Je sais que le droit à la propriété intellectuelle le défend mais enfin, doutant que ce genre de propriété dite « intellectuelle » puisse être raisonnablement invoquée dans le cas de pareil visuel qui semble jeté à l’arrache sur une capture d’écran de Google Earth.
Cette vue aérienne est un excellent ressort pour comprendre à quel point le projet ne s’insère nullement dans le bâti existant et nie son existence. C’est simple, même un gamin de 5 ans se rendrait compte avec le recul nécessaire qu’il est en train de faire n’importe quoi et d’emboiter de force les gros LEGO® blancs, ceux de la mauvaise boite, sur le village des Schtroumpfs qu’aurait conçu son grand frère. Un gamin de 5 ans oui, mais OGic et Agrega, eux, non.
OGIC SA : 955 m2
- N° 3 à 7 rue Georges Clemenceau.
Encore un ensemble pavillonnaire de lotissement d’après guerre agrémenté de savoureux jardins. Le n°7 est peut-être celui qui offre l’architecture la plus remarquable avec son petit palier couvert :
SCI Villeurbanne Clemenceau : 200m2
- N° 161 à 165 rue Léon Blum et 62 rue Frédéric Faÿs.
On passe devant sans les remarquer. Ces maisons basses et indigentes sans doute n’ont plus leur place ici sur l’ancienne grande route de Crémieu. Artère d’importance encore aujourd’hui elle est appelée à une solide refonte. Mais quel dommage pour cette petite maison en retrait rue Faÿs à l’heureuse décoration de gouttes creusée dans l’enduit de façade.
SCI Villeurbanne Blum-Faÿs : 774m2
- N° 35 à 39 rue des Alliés.
Le charme esquissé par ce front de rue est réel. Il y a des espaces de travail enserrés dans de l’habitat populaire bien construit et ponctué de verdure. Citons en particulier un beau bâtiment sur cour ornée d’une terrasse à clôture en béton ouvragé :
Heureusement qu’un projet immobilier est venu proposer une solution à ce déplorable et vivant état de diversité urbaine.
Kauffman & Broad : 998 m2
- N° 77 à 83 rue de Fontanières.
Un lot de 4 maisons particulières avec leurs jardins potagers dont le N° 79 devancé de son joli petit porche en bois.
Particulièrement prometteur en matière de désinformation, le bénéficiaire indiqué au projet est « SCCV » (c’est-à -dire société civile de construction et vente, ce qui est une présentation aussi satisfaisante que si pour décliner votre identité vous disiez que vous vous appelez « Madame ») et ne s’arrête naturellement pas en si bon chemin.
Ainsi l’affichage porte sur le N° 75 sans indiquer les confins exacts du projet. Cette fois-ci, comme en beaucoup d’autres occasions, les superficies affichées, qui sont très importantes, m’ont obligé à un examen impliquant notamment un tâtonnement en ligne et la recherche d’un hypothétique visuel/descriptif du projet. Pour se trouver si reprochable dans son procédé d’affichage s’agit-il d’un projet qui aspire donc à la confidentialité ? Apparemment oui puisque à deux reprises des propriétaires en me voyant photographier leurs biens (au passé) se sont inquiétés de mon droit, du leur, du risque en définitive que je puisse différer le moment très important où la pelleteuse roulera sur leur maison. Devant cette improbable inversion des valeurs que l’on doit aux inépuisables ressources du monde du fric, où tout se vend et s’achète, je me suis contenté de répondre combien j’aimerais avoir autant de pouvoir qu’ils m’en prêtent.
En tous les cas, la rue de Fontanières fout le camp, mais chut ! Ne l’ébruitez surtout pas.
SCCV ? : 703 m2
- Rue des Deux Frères, coté pair.
Faute de précision là encore on est contraint à composer avec les chiffres des superficies indiquées, et réduits à la spéculation. Je n’ai donc aucune certitude. A ce qui ressort c’est un coté de la rue des Deux Frères, ce prolongement villeurbannais de la cité Montchat, qui saute presque intégralement. Sous couleur de simplicité, les demeures y sont attachantes et cohérentes entre elles. Enfin, nous nous trouvons dans un futur périmètre d’intérêt patrimonial, c’est donc une dilapidation, propre, classique et dans les règles.
SAGEC Rhone Alpes : 630m2
- N° 5 et 7 rue Faillebin et arrière sur rue Jacob.
Ainsi rattrapé, par les promoteurs qui sont venus lui dire coucou, l’autre versant de la rue Jacob pourra s’harmoniser dans l’ascèse et la dignité inhérente à tout cube qui se respecte. Car telle est désormais la figure de la rue Jacob, un alignement de forme de la plus scrupuleuse homogénéité et qui ne va pas sans rappeler l’heure chaude et dorée des bungalows de camping ou celle des préfabriqués de chantier. A noter que ce projet n’est pas à comprendre comme suite et fin au chapitre rue Faillebin, puisqu’un projet récemment déposé, dont il ne sera pas question ici, se propose de rayer tout le reste de la rue. C’est bien normal. Inutile de préciser que sur l’affichage aucune indication utile à la localisation des superficies du projet ne figure, et qu’enfin nous nous trouvons dans un futur Périmètre d’intérêt patrimonial.
SARL Cie Onyx, environ 345 m 2
- N° 64 rue Anatole France.
Ce permis aurait mérité d’être rangé dans une catégorie conçue spécialement pour lui : les permis qui ne veulent strictement rien dire. Passé le temps de la syncope à la vue d’un affichage annonçant une démolition totale placardée sur la remarquable immeuble Art déco de 5 étages de l’édifice, on comprend que ladite démolition totale ne s’applique qu’aux dépendances en retrait sur cour. Alors en fait, oui, sur cette partie là des bâtiments la démolition qui s’applique est ferme, totale et même, j’irai plus loin, définitive. Il s’agit par conséquent d’une démolition partiellement totale, c’est une façon de voir les choses. Enfin, la hauteur des bâtiments est fixée à 1653 m, ce qui parait une limite raisonnable pour éviter les collisions de fusée.
Au demeurant si la perte de ce fonds industriel parait un moindre mal elle laisse perplexe sur la disparition de tout souvenir de l’industrie en centre ville.
SNC les jardins d’Anatole : 1223m2
- 23 à 29 rue de la Poste.
Déjà cité plus haut le N°25 rue de a Poste ne part pas seul mais avec toutes les maisons voisines. Nous sommes bien entendu dans un futur périmètre d’’intérêt patrimonial où l’on surveille très consciencieusement tout ce qui se passe.
SCI Villeurbanne et Diagonal : 950m2
- N° 101 à 105 rue Léon Blum et retour rue Pierre Baratin.
Les meilleurs permis sont ceux qui savent s’arrêter, celui-ci a eu du mal, il aurait bien dévoré davantage la ville mais la Ville encore n’était pas prête. Il englobe notamment une maison longeant l’ancienne voie de passage dont le linteau en bois dénote l’ancienneté et la vocation rurale. Elle doit bien être bicentenaire.
SLCI : 3840 m2
- Rue Francia et rue de la Soie.
Sous ses dehors de ville fantôme, cette zone entière attend la curée pour l’aménagement de la ZAC de la Soie. Rencontrer autant de panneaux de permis de démolir au m2 n’est pas ordinaire. Au moins le message se fait-il parfaitement entendre. D’ailleurs le secteur est déjà parfaitement troué, vidé comme un vieux sac. On comprend qu’il est appelé à une transformation de fond en comble. Ce qui est cité d’ailleurs n’était que le fond d’un tiroir déjà débarrassé de son contenu.
Au N° 13 rue de la Soie un bâtiment consacré par la rue :
Après il y a pire, il y a le chômage, la guerre et surtout le projet Gratte-ciel nord.
note : cet ensemble a été démoli début juillet 2018
Métropole de Lyon : environ 3000 m2
- Projet Gratte-ciel Nord : N° 165 à 169 Cours Émile Zola, N° 1 à 19 rue Léon Chomel et N° 2 et 4 rue Jean Bourgey.
Avec ses 78 logements démolis jetés par packs de 6, le projet Gratte-ciel nord occupe sans conteste le haut de ce classement. Rien ne manque à ce projet : la qualité des immeubles démolis, tant du point de vue de la conservation matérielle que de leur large capacité d’accueil, de leur effet décoratif, enfin de leur diversité historique (panel du XXe siècle).
Car on a même mis au panier des immeubles de moins de 60 ans d’âge, parce qu’après tout pourquoi pas, ils étaient sur le passage, et que de toutes façons le gaspillage ça reste tendance et que les économies c’est bon pour les pauvres :
Tout dans cet amphigourique projet enfin incarne la réussite, le prestige, la mesure. En plus il est patrimonial en quelque sorte puisqu’il prolonge une avenue historique (Av Henri Barbusse) ,œuvre inachevée, et dont personne n’avait réclamé la continuation mais dont nos édiles peuvent bien se revendiquer le génie et le mérite :
Métropole de Lyon : 7504m2
Conclusion
Cette petite expérience de terrain, fondée sur un relevé qualitatif et quantitatif des affichages villeurbannais donne une idée du rythme effréné auquel s’ordonne le renouvellement urbain. La surface totale promise à la démolition fin juin 2018 pouvait être estimée à 35 580 m2 (soit 3.558 ha). Cette donnée est à rapprocher de la superficie totale de la commune (voies comprises) équivalent à 1452 hectares [1], et dont elle représente 0.25%. On obtiendrait bien entendu un pourcentage plus important, mais surtout plus proche de la réalité, en rapportant les m2 démolis à la superficie bâtie de la ville au sens stricte, c’est-à-dire retranchée des infrastructures viaires.
Ce résultat ne correspond à aucune temporalité exacte : entre la pose de l’affichage et la démolition, la durée est très variable et peut dépasser une année et demi. En outre le résultat obtenu confond projets actés de très longue date, comme aux Gratte-ciel ou à la Soie, et projets dont l’échéance est plus immédiate. Observons par ailleurs à propos de ces grands chantiers qu’ouverts depuis longtemps leurs travaux ont été repartis dans le temps. Ils figurent donc ici non dans leur totalité mais comme juste échantillon à cette contribution datée. Mais, qu’il s’agisse ou non de projets de grande ampleur sortant du cadre trop temporel dans lequel je les ai replacées, ces surfaces correspondent bel et bien à de très prochaines démolitions.
Une aperçu géographique révèlera que les quartiers les plus visés sont ceux situés directement à l’Est des Gratte-ciel, secteur dont la densification constitue une stratégie à poursuivre. Mais la ville est également prise par l’extrême Est, depuis La Soie, dans un mouvement imprimé cette fois vers l’Ouest, dans un effet d’étau.
Enfin, en instruisant ce sujet dont je croyais avoir balisé par avance les enjeux, je me suis trouvé le premier surpris. Le nombre affiché de démolitions est impressionnant mais les surfaces couvertes le sont plus encore. Cette main d’acier poursuit son œuvre sur la ville mais sans ostentation, et c’est un grignotage méticuleux qui est certain d’avoir raison d’elle. Beaucoup de permis ressemblent au trou minuscule dont l’arrière fait la plaie béante. Son renouvellement total est le but qu’elle poursuit quoique son sujet ne soit pas clairement rendu public (on se contente de fixer le cap d’un certain nombre d’habitants ou de logements à atteindre dans un certain délai sans mesurer l’implication solide de ces chiffres).
Concernant la question patrimoniale, le paradoxe villeurbannais tient sans doute à la défense idéologique d’une spécificité, d’une autonomie (contre Lyon) mais qui ne s’investit dans aucune visée de défense matérielle. D’un coté elle forme le souhait de rester attractive, pérenniser les éléments d’une mémoire populaire et industrielle, alors qu’en acte ces propriétés urbaines sont niées. En témoigne les quartiers de banlieue et de lotissement, parfois remarquables et qui présentent l’attrait de compter comme premiers occupants du sol, particulièrement ciblés des programmes de standardisation et de densification de la ville. La municipalité a le droit de dédaigner ce sujet mais la perte de cette identité consommée que lui restera-t-il à clamer en matière de représentation en dehors des Gratte-ciel et des quartiers de faubourgs frontaliers à Lyon et qui n’ont de valeur que ce que la proximité directe de Lyon leur a donnée ? Au rythme où vont les choses, Villeurbanne sera totalement renouvelée d’ici 30 à 40 ans. Elle aura perdu tout son attrait physique. Cet aspect sera-t-il compensé par le succès d’occuper désormais le rang de 18e ville de France, peut-être même le 17e, sur le plan du nombre d’habitants? Il est très douteux que pareil mérite soit perçu comme véritable sujet de préoccupation pour toute autre personne qu’un élu ou un représentant de l’administration municipale ou métropolitaine.
Il existe une disproportion flagrante entre le nombre colossal de mètres carrés brassés au quotidien par les aménageurs et leur place dans le débat public. On peut se dire indifférent à la question d’harmonie ou de conservation patrimoniale, on peut se dire satisfait même des aménagements, mais encore s’estimer concernés par leur réalisation. Les affichages sont censés jouer ce rôle. Or n’importe quel citoyen.e qui souhaiterait s’impliquer jugeraient rapidement que les affichages ne suffisent à remplir ce devoir d’information public. Qu’elle soit ou non intentionnelle, la désinformation des affichages réguliers, est assurément un avantage à ce renouvellement confidentiel et quotidien de la Ville. Parlons si l’on préfère d’un entre soi qui associe les propriétaires privés et l’Administration au mépris de l’intérêt commun. Ces panneaux qui en disent le moins possible et à la vue desquelles il est impossible de rien comprendre sans interprétation, acharnement de recherche, chiffres et collectes de données en renfort, dissuadent et éloignent le débat citoyen. Tout concourt à l’idée que les décisions, celle qui portent sur la ville matérielle, ses aménagements, ne concernent pas l’information du plus grand nombre. Que dire alors de l’avis et de l’agrément de ce plus grand nombre ?
Dans une conjoncture de renouvellement aussi brusque, les habitants et les citoyens devraient avoir en main les clefs de ce devenir au lieu de se les voir ôtées. Comment autant d’aménagements peuvent-ils prendre place dans la cité sans minimum de concertation publique ? En indécrottable idéaliste, à la mesure de tout ce qui se démolit dans une ville et tout particulièrement sous le prisme d’une canaille discrétion qui parait délibérée, je plaiderais en faveur d’une transparence. Une transparence offrant la possibilité de s’emparer du sujet mais encore d’ouvrir son débat à la concertation démocratique.
[1] Source : http://plu.grandlyon.com/data/communes/VILLEURBANNE/pdf/VILLEURBANNE-CAH_COMM.pdf
3 réflexions sur « Villeurbanne-Ce que le PLU-H m’a enlevé »
Quelle horreur, quel gâchis.
Personnellement, je trouve que le pire est le 25 rue de la poste.
Y’a des gens qui font vraiment n’importe quoi qui gâchent de si belles maisons avec tellement de médiocrité, d’inconscience et de cupidité.
Bonjour
Vous avez oublié un permis de construire purgé 14 rue Georges Courteline Villeurbanne/ key invest.
Vous avez également oublié le 3 cours Tolstoï Villeurbanne .
HLM Villogia
Qui ont préempter .
Je suis dans l’immobilier c’est ma spécialité.de vendre au promoteur bailleur social.
Vous pouvez venir photographier si ça vous chante le début de la rue des Alliés, côté impair, jusqu’au 35, les villas ont été rachetées par Bouygues, qui va construire une monstruosité dont l’instruction du permis de construire se termine ces jours-ci ! Le 114 rue Alexis Perroncel est englobé dans le projet.